Pourquoi « investir » dans le football en Suisse ?

Peu de temps après ma courte mais agréable expérience auprès du Carouge FC, je me retrouve propriétaire du FC Stade Nyonnais SA, équipe évoluant depuis peu en deuxième division professionnelle Suisse.

Quelle est la part de rationnel dans ce type de décision ? Existe t’il une possibilité de retour sur investissement ? 

À vrai dire dans le football les investissements ont diverses raisons. Il y a trois sortes d’investisseurs, ceux qui ne regardent que la partie financière, ceux qui recherchent à se faire ou compléter un réseau, ceux qui sont dans la pure émotion, soit le vrai coup de cœur. Dans mon cas c’est un peu des trois sachant que dans le football Suisse, et de façon générale, l’achat d’un club n’est de loin pas une bonne affaire financière. 

Être propriétaire d’une société active dans le football, pourrait s’avérer un investissement intéressant, si le but était la revente du club quelques années plus tard, avec une valorisation dépendant grandement des actifs non financiers et matériels, assez précaires finalement. Quels seraient-ils ?

  1. des (bons) joueurs, entraîneurs, staff sous contrat encore à l’heure de l’évaluation et pour une durée moyenne (2-3 ans), ceci pour améliorer le potentiel de revente; 

  2. un réseau de soutien et sponsoring constant et engagé dans la durée, une bonne relation avec les parties prenantes (responsables politique, autorités locales, faîtières football etc);

  3. des contrats d’utilisation de terrains et de lieux d’entraînement (rarement une propriété des clubs…) de longue durée, clair et financièrement intéressant;

  4. une participation garantie à un événement / tournoi à fort potentiel rémunérateur (coupe Suisse, voire participation à une ligue européenne…);

  5. des revenus de retransmission (droits TV);

  6. l’historique et la réputation du club.

Un club de football ne peut pas être évalué comme une société traditionnelle sur la base de son bilan, de son résultat d’exploitation, de son EBITDA, car les bénéfices d’un club de football sont rares. C’est le budget à disposition qui prime l’activité et les investissements. Prenez les budgets des clubs en championnat européens et vous verrez que le classement en championnat est très aligné sur le budget des clubs. 100 gagné = 100 dépensé. L’actionnaire recherche la prise de valeur de son actif par une bonne gestion de ses contrats, de ses liquidités et de son organisation interne et sportive.

Les clubs internationaux de renommée comptent sur les sources de revenus suivantes. 

Prenons l’exemple du Real Madrid : 

Sources: Comptes annuels du Real Madrid

Et donc la part en % de chaque source de revenus au chiffres d‘affaires 

Sources: Comptes annuels du Real Madrid

Pour revenir à la question qui a généré ma présentation - Pourquoi « investir » dans le football en Suisse? - je me dois de répondre que je ne me situe pas dans une logique d’investissement dans ce club afin d’en dégager un profit financier.

Les clubs de football régionaux, comme le Stade Nyonnais, résistent au temps et aux diverses directions sportives par l’exemplaire engagement des habitants de la côte, leurs enfants, des anciens joueurs. Ils partagent tous les beaux souvenirs et émotions où peu de sports peuvent se comparer au football. Le propriétaire ou le directeur du club eux ne sont que, modestement, de passage. 

C’est donc pour moi un investissement passionnel que le rationnel ne peut saisir ou tenter d’expliquer. Je suis animé par un sentiment de remplir mes obligations le mieux possible (dans ce cas précis dans un alignement de circonstance assez incroyable), dans un esprit à la fois communautaire et de partage plus qu’entrepreneurial. C’est d’ailleurs cet équilibre-là, qui est le plus difficile à maintenir dans la durée. 

En tant que financier, entrepreneur et surtout père de famille, le réseau que m’offre le football est extraordinairement varié, attachant et fascinant et je suis surpris de rencontrer énormément d’amoureux de ce sport qui recherchent la même chose que moi.  C’est en effet avec beaucoup de plaisir que je constate, que de nombreux entrepreneurs en suisse, ont aussi « joué au foot plus jeune » comme ils disent et nous échangeons en plaisantant, en regardant les petits jouer, que nous avons dû renoncer à une brillante carrière professionnelle dans les grandes équipes pour un problème de genou ou par amour des études.

Alors les terrains de foot, lieu d’affaires potentielles ? Plutôt, en ce qui me concerne, un partage d’émotions, de convivialité et de fraternité, même quand nous supportons des équipes différentes ainsi que des moments agréables et enrichissants avec des personnes qui partagent les mêmes valeurs.

Michael Palma 

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